Aide sociale – Le piège

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Les systèmes d’aide sociale devraient soulager la pauvreté, non pas l’entretenir! On apprend plutôt que les prestataires de l’aide sociale sont dans la misère lorsqu’on leur consent un soutien de l’État, lequel s’assure en plus de les voir dépenser d’abord leurs économies. Il s’agit d’un véritable piège, celui de la précarité durable.

Les plus récentes statistiques dévoilées par la banque alimentaire Moisson Montréal confirment une augmentation de la clientèle de 22 % par rapport à 2009. D’autres signaux confirment l’omniprésence de la pauvreté: parmi les usagers des comptoirs alimentaires, on note une hausse de 40 % des familles soutenues par l’aide sociale.

Voilà pour les échos du terrain. Ils témoignent d’une détresse économique qui contraint les pauvres gens, celles pour qui l’on remplit ces jours-ci de très éphémères paniers de Noël, à quémander pour garnir leur table.

Voici maintenant pour le portrait théorique, rendu cette semaine par le Conseil national du bien-être social. Un survol pancanadien conforte le Québec dans une position moyenne, à mi-chemin entre le pire et le meilleur. De façon générale, le Conseil note que les hausses de prestations d’aide sociale n’ont absolument pas suivi le train de l’inflation. Le rapport insiste de manière troublante sur le fait que la plupart des personnes ayant présenté en 2009 une demande d’aide sociale «devaient pratiquement être dans la misère avant d’avoir droit aux prestations». Cela est anormal.

Les chiffres bruts traduisent mal la réalité des prestataires en chair et en os. Celle de cette femme monoparentale, début quarantaine, vivant avec sa fille de 15 ans. Elle est sous le choc d’une mise à pied — une pensée ici pour les employés d’Electrolux, de L’Assomption. Après avoir épuisé les ressources de l’assurance-emploi et échoué dans la recherche d’un autre travail, elle se résigne à demander l’aide sociale. On lui répond qu’elle n’y a pas accès.

Pourquoi? Parce qu’elle a versé un petit pécule dans un régime enregistré d’épargne-études destiné à sa fille, de même qu’un petit montant dans un REER. Parce qu’elle possède sa propre maison, dont elle paie l’hypothèque. Bref, parce qu’aux yeux du régime, elle possède des actifs immobilisés et des liquidités qu’elle doit épuiser avant d’être dans la vraie «misère».

La suite de l’histoire? Cette femme, comme nombre d’autres, aura ensuite grand mal à s’extirper du cycle de la pauvreté, car les niveaux d’exemption de liquidités trop bas, conjugués à de faibles prestations, l’y auront enfoncée de manière quasi définitive. Elle encaissera d’abord son REER pour avoir accès à l’aide sociale. Avec ses prestations, elle ne pourra plus payer son hypothèque. Elle vendra donc sa maison, pour apprendre ensuite que ces profits générés — de nouveaux actifs — la privent du soutien de l’État. L’année suivante, elle paiera des impôts additionnels pour avoir encaissé ses REER.

Le Manitoba a récemment révisé sa politique relative aux avoirs liquides, pour permettre une exemption de 4000 $ par personne — jusqu’à concurrence de 16 000 $ par famille. Cette manière de faire tend à ramener l’aide sociale à une mesure temporaire plutôt qu’une chute vers la précarité permanente. L’état actuel de plusieurs régimes provinciaux place plutôt les bénéficiaires dans le dénuement le plus complet et les prive de leurs économies pour la retraite. Il s’agit d’une mesure coûteuse pour les États qui devront soutenir ces abonnés de longue durée incapables de se sortir du pétrin financier.

Auteure: Marie-Andrée Chouinard

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