Presse-toi à gauche ! a reçu copie d’une lettre adressée à Michel Arsenault, qui circule parmi les membres de la FTQ. Le Comité de rédaction de PTAG considère qu’il s’agit d’une excellente contribution au débat et a décidé de la publier.
Diviser pour régner, cette stratégie politique est le parfait contraire des valeurs syndicales que nous défendons. Pourtant, vos agissements des dernières années, en tant que président de la FTQ, ont eu des retombées beaucoup plus négatives que positives sur l’ensemble de la Fédération et de ses syndicats affiliés. Nous vous demandons donc de quitter la direction de la Fédération lors du prochain congrès. La dernière chose dont nous avons besoin, c’est d’un banquier à la tête de la FTQ.
Depuis le début de votre mandat vous avez fait la démonstration que vous étiez plus préoccupé de vos liens et de votre image auprès des dirigeants d’entreprise et des chefs politiques que de démontrer votre appui aux travailleurs et travailleuses. Votre conférence de presse dans les locaux de la FTQ à laquelle vous aviez convié Michael Ignatief en janvier 2009, et vos déclarations à l’effet que le Canada avait besoin d’un bon plombier nous ont laissés songeurs.
De toute évidence, nous n’avons pas les mêmes fréquentations, vous considérez Tony Accurso comme votre ami et vous avez séjourné sur son bateau. Frank Zampino ex-président du comité exécutif de Montréal l’a fait aussi avant vous, quelques semaines avant le dépôt officiel pour un contrat de plus de 300 millions de dollars de la Ville pour son projet d’implantation de compteurs d’eau. En tant que président de la plus grande centrale syndicale au Québec et représentant de milliers de travailleurs et travailleuses vous auriez du faire preuve de plus de discernement. Suite à ces événements, vous êtes resté muet pendant des semaines.
Devant la bataille d’une poignée de travailleurs du Journal de Montréal contre l’empire Péladeau, vous avez agi selon vos propres termes avec une philosophie de banquier, en privilégiant le rendement financier plutôt que la solidarité syndicale. Pierre Karl Péladeau avait mis à la rue pendant plus d’un an les employées et employés de Vidéotron et du Journal de Québec parce qu’il voulait négocier à la baisse. Au moment où vous annonciez votre intention d’investir avec lui, Péladeau voulait rouvrir la convention collective du Journal de Québec pour baisser le plancher d’emplois. On pourrait commencer à parler ici non pas seulement d’un manque de solidarité, mais d’un manque d’intégrité.
Vous n’avez pas su répondre aux attaques faites contre les travailleurs de la construction. En refusant pendant un an et demi de vous prononcer pour une commission d’enquête dans l’industrie de la construction, vous avez fait en sorte de placer les projecteurs principalement sur la FTQ et non sur les entrepreneurs et le gouvernement. Vous êtes devenu de fait le seul allié de Charest dans cette affaire. Malgré un volte-face, vous aurez été finalement le dernier à céder devant l’évidence, juste avant Jean Charest. Bravo ! Belle preuve de leadership.
Cette situation est grave de conséquences pour la FTQ et pour tout le monde syndical. Elle donne de l’eau au moulin à ceux qui veulent affaiblir les syndicats. Le Conseil du Patronat et la Chambre de Commerce ont profité de cette situation pour insinuer qu’il existe un déséquilibre entre le pouvoir des syndicats et celui de leurs membres et qu’il faut modifier le Code du travail de façon à revoir la formule Rand, imposer des votes secrets lors des demandes d’accréditation, donner plus de recours aux employés contre leur syndicat…
Alors que le libre-échange a des conséquences dévastatrices sur l’économie canadienne et québécoise, et par conséquent sur nos emplois, vous vous êtes déclaré, l’an dernier, en faveur d’une union monétaire canado-américaine, avec un pays dont l’économie est 11 fois plus importante que celle du Canada. Ce qui, selon la plupart des économistes, ne peut conduire qu’à adapter la fiscalité canadienne à celle des États-Unis, avec les conséquences que l’on connaît.
Durant la lutte des syndicats du secteur public, vous avez refusé tout débat et tout rapprochement avec une coalition populaire qui se battait pourtant contre le démantèlement des services publics. Alors que la CSN, la CSQ et la CSD en plus de plusieurs autres groupes dont la FEUQ, la FECQ et l’AQDR participaient à une conférence de presse avec cette coalition l’hiver dernier afin de dénoncer les intentions du budget Bachand, vous étiez le seul absent. Il vous a fallu d’ailleurs quatre mois pour commencer à réagir à ce budget dévastateur pour la population.
Alors que la population est en émoi face aux droits d’exploitation du gaz de schiste des compagnies gazières, aux dangers environnementaux réels, aux pressions pour faire accepter cette couleuvre à la population, vous avez déclaré devant les médias que les scientifiques n’ont pas eu le temps de faire toutes les validations sur les questions qu’on se pose, mais pire, vous affirmez que les gens bien informés appuient les bonnes décisions. Comme si le mouvement d’opposition était simplement mal informé. Votre déclaration a par la suite du être corrigée par le service de communication de la FTQ pour la rendre plus conforme aux intentions du bureau.
Nous tenons à vous rappeler que vous avez été élu pour représenter les travailleurs et les travailleuses, de toute évidence vous vous êtes montré incapable de remplir ce mandat.
Contrairement à ce qu’on était en droit de s’attendre, vous avez étouffé les débats, multiplié les pressions et créé un état d’Omerta qui n’est pas à l’image de la diversité de la FTQ, ce qui conduit inévitablement les militants et militantes à agir autrement ; soit en faisant le débat de façon clandestine, soit publiquement ou encore à garder le silence. Certains ont même envisagé de quitter la FTQ. Vous avez amené notre centrale dans un état déplorable.
Pour toutes ces raisons, nous pensons que vous n’avez plus votre place comme dirigeant de la FTQ. Votre bilan démontre malheureusement que vos intérêts sont plus près des chefs d’entreprise et des banquiers. Comme quoi il n’est jamais trop tard pour faire une réorientation de carrière !
Le 3 décembre l’histoire s’écrira sous nos yeux !
Des militants et militantes de la FTQ pour la démocratie et l’intégrité syndicales
Par:Le groupe hétérodoxe
Source: http://pressegauche.org/spip.php?article5911